Tunisie : quelle part dans l’intégration africaine ?

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Tunisie : quelle part dans l’intégration africaine ?

Tunis, 24 novembre 2025—PRESS AFRICA— Longtemps tournée vers la Méditerranée et l’Europe, la Tunisie reconfigure progressivement sa vision géopolitique pour s’ancrer davantage dans la dynamique africaine. Si son positionnement historique la lie naturellement au Maghreb, les crises internes et les mutations géopolitiques du continent poussent Tunis à élargir ses horizons diplomatiques et économiques au-delà de ses partenaires traditionnels.

Mais quelle est réellement la part de la Tunisie dans l’intégration africaine ? Quels leviers mobilise-t-elle, et quels obstacles freinent encore son engagement ?

Sous-exploitation du positionnement géographique

Située à la jonction entre l’Afrique du Nord, le Sahel et la Méditerranée, la Tunisie dispose d’atouts majeurs pour devenir un pont entre l’Europe et l’Afrique. Pourtant, pendant des décennies, cette dimension africaine a été reléguée à l’arrière-plan au profit d’un partenariat renforcé avec l’Union européenne ; d’un arrimage économique centré sur la Méditerranée et d’une diplomatie tournée vers le monde arabe.

La transition politique post-2011 a incité le pays à reconsidérer son rôle continental, notamment en raison de la diversification recherchée de ses partenaires économiques ; de la concurrence croissante avec d’autres pays maghrébins et de l’ouverture de nouveaux marchés africains, notamment dans les TIC, la santé et l’enseignement supérieur.

Une diplomatie africaine réactivée

Au cours des dernières années, Tunis a renforcé sa présence sur la scène africaine en misant sur une multiplication des missions économiques en Afrique de l’Ouest et centrale ; des partenariats de coopération technique dans les domaines de la formation, de la santé et de l’administration publique ; et sur une une réaffirmation de sa politique d’ouverture au marché africain à travers la ZLECAf, que la Tunisie a ratifiée en 2020.

Par ailleurs, le pays s’efforce également de consolider son rôle au sein de  l’Union africaine, de la Banque africaine de développement (BAD), basée à Abidjan et au sein de la COMESA, qu’elle a intégrée en 2018. Ces adhésions témoignent de la volonté tunisienne de s’intégrer davantage dans les chaînes de valeur africaines.

Des secteurs tunisiens déjà implantés en Afrique

Malgré des moyens limités, certains secteurs tunisiens ont su s’illustrer avec succès dans plusieurs pays africains. Il s’agit notamment des secteurs de la santé, de l’éducation, de la technologie et de l’information et des BTP.

Santé : les missions médicales tunisiennes sont déployées dans plus de dix pays africains. Les cliniques tunisiennes accueillent chaque année des milliers de patients africains pour des soins spécialisés.

 Enseignement supérieur : les universités privées tunisiennes attirent une part croissante d’étudiants africains francophones. Des accords de coopération éducative se multiplient avec l’Afrique centrale et de l’Ouest.

Technologies de l’information : les entreprises tunisiennes TIC proposent des solutions en e-administration, digitalisation bancaire et cybersécurité. Elles participent à des projets de modernisation administrative dans plusieurs capitales africaines.

Travaux publics et l’ingénierie : les bureaux d’études tunisiens sont présents dans la construction d’infrastructures routières, énergétiques et sanitaires.

Quid des turbulences internes relatives  à la diplomatique ?

Le potentiel tunisien reste toutefois entravé par des défis majeurs dont une instabilité politique depuis 2011 ; un ralentissement économique persistant; une dette publique élevée, des tensions sociales récurrentes et une administration parfois lourde et peu réactive.

Ces contraintes limitent la capacité de la Tunisie à porter de grands projets continentaux ou à rivaliser avec d’autres puissances africaines comme le Maroc, l’Algérie, l’Égypte ou l’Afrique du Sud.

Entre Maghreb fragilisé et Afrique en mutation

L’un des obstacles à l’intégration africaine de la Tunisie reste l’absence de dynamique maghrébine. Le blocage de l’Union du Maghreb arabe (UMA) réduit notamment, la portée économique régionale de la Tunisie ; la possibilité de constituer un bloc nord-africain cohérent et le poids diplomatique du pays dans les négociations continentales. Le repli algéro-marocain et la fermeture des frontières entre Rabat et Alger compliquent toute vision commune de l’Afrique du Nord.

La ZLECAf : une opportunité à saisir

La Tunisie voit dans la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) un moyen de diversifier ses exportations ; d’attirer des investissements ; de devenir un hub méditerranéen – africain et de développer ses PME vers les marchés subsahariens.

Une contribution intellectuelle et culturelle remarquable

Au-delà de l’économie, la Tunisie joue un rôle important dans la production académique africaine ; les forums sur la démocratie et la gouvernance et la circulation des idées et des élites africaines francophones. La culture tunisienne, réputée pour son ouverture et son cosmopolitisme, continue de faire rayonner le pays sur le continent.

Une part réelle mais encore en devenir

La participation de la Tunisie à l’intégration africaine est modeste mais réelle, prometteuse mais encore limitée. Mais pour devenir un acteur majeur de l’intégration africaine, Tunis devra stabiliser sa scène politique, moderniser son administration, renforcer ses infrastructures logistiques et clarifier sa stratégie africaine sur le long terme.

La Tunisie a les compétences, les savoirs et le positionnement géographique pour jouer un rôle plus ambitieux. Reste à lui donner les moyens politiques, économiques et institutionnels de ses ambitions.

Rédacteur: Saïd TESSILIMI

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